Qu’est-ce qu’un cas d’abord et enfin ?
Une fable. Une fable, au sens propre. L’écrire n’est pas une mince affaire. Et qu’est-ce qu’une vie, sinon l’histoire d’une légende ?
Il n’y a de fait que de discours, et il est vain de vouloir séparer la construction de l’épaisseur des « faits bruts ». Le passé n’est là atteint qu’à la limite, toujours après coup. Juste à parler et c’est déjà du jamais plus (« le moment où je parle est déjà loin de moi » Boileau). Il y a de l’histoire parce qu’il y a du révolu et la passion de l’histoire, c’est la passion du révolu : « Un historien ne soupçonne rien, il ne croit qu’au texte » (Alphonse Aulard).
Au nom de réquisits justificationnistes, d’aucuns voudraient être en face de l’histoire ou de l’inconscient des patients de Freud notamment, comme le physicien en face de son objet. Se sont-ils avisés qu’à vouloir rendre les événements à leur soi-disant réalité, on les fait s’évanouir ? Cette volonté de faire preuve est à la base de tous les révisionnismes. Il me revient ici, la fiction de Borges qui met en scène l’histoire d’un homme qui retient tout, réfractaire à l’oubli « ma mémoire est comme un tas d’ordures ». Il vit en dehors du temps.
L’histoire du cas relève moins de la chronique insipide de la vie d’untel que de l’effort pour viser une logique, suivre avec une rigueur extrême le trajet d’un signifiant dans ce qu’il a d’insensé… Ce semblant apparaît dés lors comme son bien le plus précieux. Une fois la fiction traversée, que reste-t-il ? Un intérêt renouvelé pour les fables !